Textes et photos : Philippe Landry, sauf indication contraire
Les moulins des rivières Nièvre
Nièvre de Champlemy, Nièvre d’Arzembouy, Nièvre de St-Benin, Nièvre de St-Franchy et Petite Nièvre, Nièvre de Bourras, etc… elles ont animé quantité de moulins. Nous en livrons ce que nous avons pu établir de leur histoire dans cette série de 5 cahiers, aujourd’hui celui consacré à la Nièvre de Champlemy.
(Lorsqu’une commune possède une rivière non affluente à la Nièvre, les moulins de celle-ci ne sont pas étudiés).
Les moulins des Nièvre ont connu une grande diversité d’activités. Ils ont évidemment surtout travaillé le grain de blé pour fournir en farine panifiable la population. Mais les moulins broyaient aussi les céréales secondaires (orge, avoine) pour nourrir les animaux.
Très souvent le moulin à grain disposait d’une annexe pour transformer en huile la noixou ou la noisette et plus encore la navette (une fleur jaune de la famille du colza).
On rencontrait aussi des foulons : dans une cuve pleine d’eau, on mélangeait la laine, le chanvre et de « l’argile à foulon ». La roue du moulin, grâce à l’arbre à cames, faisait tomber et retomber dessus un gros marteau, cela pendant trois jours. Il en sortait une « étoffe », les derniers temps assez médiocre, dont on faisait le feutre des chapeaux, l’épais manteau des paysans, et les couvertures des chevaux.
On rencontrera quelques moulins à papier ou à carton, et plus encore de moulins ayant pulvérisé la matière à faire le vernis des faïence, ce pourquoi on les appelait « moulins à faïence » ou « à blanc ».
Importance du travail du fer
Particularité importante de la vallée de la Nièvre : en raison de l’abondance de minerai de fer, des forêts fournissant le combustible des hauts fourneaux, et de l’eau pour faire tourner les roues, la vallée a connu un grand nombre de forges hydrauliques “industrielles”. La roue faisait tourner un “arbre à cames”, qui :
– Ouvrait les soufflets,
– Faisait tomber un marteau sur le minerai pour une première épuration (c‘est alors un bocard ou patouillet),
– Faisait tomber le fameux gros marteau dit martinet sur la pièce métallique en fusion pour lui donner forme,
– Faisait tomber un marteau sur le “laitier” (résidu de la forge) ; le moulin s‘appelait alors “moulin à laitier” ou bocard à laitier. Il fournissait un sable qu’on utilisait dans le moule des pièces métalliques, par exemple les canons (on parlait alors de moulin à sable). Mais ce sable, parfois nommé mâchefer, entrait aussi dans le soubassement des routes ou dans les digues des canaux.
Cependant, nous ne rentrons guère ici dans le détail du travail du fer, attendu que d’excellentes études lui ont été consacréesn notamment par Les Amis du Vieux Guérigny.
Notons toutefois que souvent un moulin est devenu une forge hydraulique et réciproquement ; ce sera indiqué aussi souvent que possible. En outre, les anciens parlaient volontiers de « moulins à fer ».
Les moulins à vent
La vallée de la Nièvre a connu quelques moulins à vent. Nous les citerons ici parce qu’en général ils étaient construits pour remédier au chômage auquel contraignaient les moulins à eau les périodes de sécheresse
Généralités sur la Nièvre de Champlemy
Géographie du secteur de Bourras
La Nièvre de Champlemy naît de sources au nord-ouest de ce village. Un lieu-dit élevé se nomme “Les Trois Lacs” : il devait donner vue sur trois étangs, dont “L’Etang du Bois”, en fait un élargissement de la Nièvre ; c‘est le premier dont on est sûr qu‘il a fait fonctionner un moulin, lequel était situé en amont de l‘actuel lieu-dit “La Bardinerie”. En aval de la Ferrauderie, la Nièvre de Champlemy reçoit la Nièvre de Bourras, qui elle-même a reçu à sa droite les ruisseaux du Pèlerin et des Anges. Au niveau du site de Chaume, la Nièvre reçoit le ruisseau de St-Bonnot.
L’abbaye de Bourras et ses moulins
Créée en 1119 (nous célébrons donc cette année son neuvième centenaire), l’abbaye de Bourras, sise sur St-Malo en Donzyois, a possédé plusieurs moulins, ou au moins bénéficié d’une rente sur quelques-uns, répartis sur Champlemy, St-Malo, Châteauneuf-Val-de-Bargis et Dompierre sur Nièvre.
L’abbaye cistercienne de Bourras est au bord d’une Nièvre que nous allons nommer « de Bourras » En vertu de la règle de St-Benoît à laquelle les cisterciens entendaient revenir avec rigueur, elle a dû très tôt se doter d’un moulin, le plus proche possible de ses locaux. D’ailleurs en 1790 ses murs jouxteront un « Champ du Moulin », situé sur le chemin de Champlemy.
En 1164, Jean, prêtre de Champlemi, donne à l’abbaye de Bourras un moulin à « titre censuel ».
Châteauneuf Val de Bargis a connu un assez grand nombre de moulins, dont quelques-uns sur la rivière Nièvre, les seuls dont nous abordons l’histoire ici, attendu qu’on peut valablement penser que ceux appartenant à l’abbaye de Bourras ou en lien avec elle étaient côté Nièvre. Comptons donc comme ayant été mus par la Nièvre :
– Impossibles à situer deux moulins, l’un, dit de l’étang Vital, donné à l’abbaye de Bourras par Godefroy, seigneur d’Arcey, en 1189, l’autre celui de Boisse, faisant l’objet d’une rente donnée à l’abbaye en 1285 par le seigneur du Brosset, de 22 bichets de mouture. (Trouvailles de Marcel Bonté).
– Le moulin de Pré Brion, qui existait en 1515, faisant partie des biens de l’abbaye de Bourras. Il est cité par l’abbé Charrault dans son livre sur Châteauneuf. Il semble s’être trouvé à hauteur du Crot-Ravard : c’est peut-être le nom ancien d’un des moulins de Chaume.
Plus simple est le cas du moulin du Pont, un groupe de maisons portant encore ce nom, sur la Nièvre de Bourras. Il fut donné en 1255 par le seigneur de Champlemi à l’abbaye de Bourras pour ne plus avoir à payer une rente de 20 sols et 3 setiers. Il fut transformé en forge hydraulique, comme on le voit en 1539. La carte Cassini n’indique rien sur ce site, dont la force hydraulique cessa d’être exploitée avant 1789.
A Dompierre exista dès 1300 la forge hydraulique du Mez sur laquelle l’abbaye de Bourras percevait une rente (trouvaille de Marcel Bonté). Le livre « La Nièvre royaume des forges » met en valeur qu’en 1674, possédée par le seigneur d’Arbourse, elle a deux roues.
Les destructions par les guerres et la mise en « commende » (monastères confiés à des privés à la religiosité bien relative) ont fait que peu à peu l’abbaye de Bourras a été dépouillée de ses richesses.
A la Révolution de 1789, l’État a mis la main sur les biens d’Eglise pour les vendre afin de payer ses énormes dettes. C’est dans ce cadre que l’abbaye de Bourras a été vendue, ainsi que le peu de bien qui lui restait.
Vue de l’étang de la Ferrauderie à Champlemy
Champlemy
Liste des moulins connus de nous, avec la date la plus ancienne d’existence trouvée : Un moulin appartenant à l’abbaye de Bourras en 1164. Forge du Boutet 1669. Sur la carte Cassini dressée vers 1754 : La Ferrauderie : fourneau avec forge, Barbelaine, forge, moulin de l’Etang du Bois. “Le moulin à vent” (De Soultrait 1865) ; Huilerie Piffaut 1884.
Le dossier 1HH1 des Archives Communales indique à Champlemy en 1669 une « Forge du Boutet » que je ne peux localiser.
La carte de Cassini dressée dans les années 1750 fait se succéder sur la Nièvre, avant le confluent avec la Nièvre de Bourras, le moulin de l’Etang du Bois et la forge de la Ferrauderie.
L’étang alimentant celle-ci fait grand. La Ferrauderie fut longtemps une forge hydraulique. C’est sans doute celle que dirigeait en 1790 un maître de forge de Champlemy, Claude Etienne Chailloux, assez riche pour tenter d’acheter une bonne part des biens de l’abbaye de Bourras, dont le monastère lui-même. Selon le dossier 1Q 865 des Archives Départementales, il se plaint d’avoir, en une période de gel, dû ouvrir les vannes de son étang au profit de moulins en aval (non nommés), ce qui l’a mené à chômer.
Au susdit confluent se trouva le moulin de Barbelaine, repéré comme travaillant le fer en 1754, indique La Nièvre Royaume des Forges, qui précise qu’en 1840 l’établissement compte deux bâtiments. Avant de devenir forge, l’établissement de Barbelaine a dû être le moulin à grain desservant Arbourse car il appartenait au seigneur de ce nom.
Au XIXe siècle : Les moulins à eau
La forge de la Ferrauderie, qui employait 28 ouvriers en 1809 selon La Nièvre Royaume des Forges, marchait encore en 1818 possédée par le marquis de Tourzèle, auquel succédera le duc de Lorge.
Le dossier 3P 53/2 des Archives Départementales indique que vers 1840 le duc de Lorge possède La Ferrauderie dont le revenu n’est pas précisé, ce qui peut indiquer que l’usine à fer ne fonctionne plus : elle sera démolie en 1864. Par contre le fourneau fonctionne encore : plan 80, revenu fiscal net 450 F. Mais il est démoli au plus tard en 1862. Le duc possède aussi le bocard plan 80, dont le revenu fiscal net est 100 F en 1864, date où il bénéficie d’une « construction nouvelle ». Le même duc possède encore le Moulin de l’Etang du Bois, plan 303, dont le revenu est de 260 F a une date non précisée.
Puis le duc de Lorge vend la Ferrauderie et le Moulin de l’Etang du Bois à Ferrand, le fameux maître de forges, domicilié aux forges de Raveau : le moulin plan 303 continue de lui rapporter le revenu fiscal net de 260 F. En 1889 le propriétaire est Gaëtan de Planier (dossier3P 53 3 des Archives Départementales).
Le dossier S 2283 contient l’élaboration du règlement d’eau du moulin de l’Etang du Bois arrêté en 1863. Il vient d’être acheté par Ferrand. A la place de l’étang qui a donné son nom à l’établissement, il est désormais alimenté par un simple bief. Le plan montre un bâtiment tout simple, avec deux roues. L’arrêté préfectoral qui promulgue le règlement d’eau contient cette phrase : « Sera conservé le nouvel empellement tel qu’il est établi sur le bief de dérivation à l’origine de l’aqueduc qui conduit les eaux sur les roues motrices, avec ses trois vannes égales ayant ensemble 3 mètres d’ouverture ».
Le dit arrêté contient un autre détail intéressant : « Le niveau légal de la retenue est fixé à 1,20 m en contre-haut du seuil de la porte d’entrée de la maison du meunier façade nord ». Donc le meunier dispose d’une « maison » sur place, ce qui n’était pas si fréquent, en particulier lorsque le moulin était dans un endroit isolé.
Concernant la Ferrauderie, les dossiers S 4132 et 6998 mettent en valeur que, sous la digue, à droite était la forge, et à gauche, plus en contrebas, un bocard à laitier (pulvérisant les scories de la gangue du fer pour en faire un sable ou mâchefer qu’on mettait dans les routes ou les digues de canal, voire les bâtiments). La forge avait deux roues et le bocard un seul. (Plans de 1843).
L’enquête de 1870 ne cite à Champlemy que le moulin de l’Etang du Bois ( (AD S10150).
Selon le dossier 3P 53-4, aux alentours de 1882 apparaissent :
– L’ensemble de la Ferrauderie qui rapporte le revenu fiscal net de 1560 en 1882, mais il est démoli en 1910. On peut penser que cela comprend d’une part le moulin à blé qu’est devenue l’ancienne usine, d’autre part le bocard qui continue à pulvériser le laitier.
- Le moulin de l’Etang qui rapporte 1070,88 F en 1882, subit une démolition partielle la même année, puis ne rapporte plus que 527,50 F en 1901.
- Le dossier M 6316 indique en activité en 1883 deux moulins à farine à Champlemy, mais le M6328 n’indique plus qu’une huilerie en 1885.
Le Dictionnaire Vallière de 1896 cite à Champlemy un “moulin à pulvériser” : il ne peut s’agir que du bocard de la Ferrauderie.
En 1910 le moulin de Champlemy chôme quelques jours à cause des inondations.
Le ou les moulin(s) à vent
La tour au sud du bourg de Champlemy me semble avoir été un moulin à vent, parce qu’il a deux portes. M. Le Flohic soutient que ce fut plutôt un colombier, mais je n’ai jamais vu de colombier à deux portes. On peut aussi émettre l’hypothèse qu’après avoir été moulin à vent cette tour est devenue un colombier.
Le dossier 3P 53/2, pour les années 1840 et ultérieures,porte les mots « le moulin à vent » sur différentes parcelles, dont parfois avec le mot « bâtiment ». Il s’agit donc du quartier du Moulin à Vent, dont un des « bâtiments » est sans doute l’ancien moulin. Il faut noter que le mot est au singulier, ce qui semble exclure qu’il y ait eu plusieurs moulins à vent : mais ce n’est pas sûr, parce que, plan 29, le pré s’appelle du Moulin Neuf. L’ensemble appartient à François Laprat, qui demeure à Cosne. Le bâtiment qui lui rapporte le plus, le 521, a un revenu fiscal net de 50 Francs seulement. Aucun moulin à vent ne semble plus fonctionner.
Des huileries à Champlemy
Le dossier 3P 53/4 révèle aux alentours de 1882 au moins que 4 huileries
– Henri Piffault, plan 328, revenu 17 F, supprimée dès 1882
– Gilbert Thibaudat, plan 999, revenu 5 F, mais porté à 116,65 F en en 1888
– François Sansois, plan 859, revenu 8 F, construite en 1850. Son revenu passe à 93,35 F en 1889.
– Meringe Archambault, plan 823, transformée en maison en 1880
Souvenir du moulin de l’Etang du Bois
Le 29 mai 1988, dans la rubrique “La Nièvre hier”, Le Journal du Centre éditait un article intitulé : “Champlemy : le moulin de l’Etang du Bois”. La photo montrait une des deux très grandes meules subsistant (deux mètres de diamètre?). Surtout, les souvenirs d’anciens du village, racontant ce que leur avaient dit leurs parents, ont permis cette description particulièrement intéressante :
“Le moulin de l’Etang du Bois se composait d’un corps de bâtiments renfermant l’habitation du meunier et de sa famille. La salle commune était très grande, avec une immense cheminée… En plus de son travail de meunier, ce dernier entretenait de grands jardins autour de son moulin. L’hiver, la saison était rude dans la forêt et bien souvent le meunier devenait bûcheron pour son compte et aussi pour les autres, la forge n’étant pas loin, les besoins en bois pour les charbonniers lui fournissaient du travail lorsque son moulin ne tournait pas.
A côté de l’habitation, les communs composés d’une écurie pouvaient recevoir quelques bêtes, une vache ou deux pour le lait et un cheval, parfois deux, pour le transport de la farine et de la famille qui le dimanche se rendait à la messe à l’église St-Maurice. A la sortie c’était la grande rencontre sur la place du bourg… Le meunier du moulin à vent situé en plein champ, était tout heureux de pouvoir parler de leur métier avec celui du moulin de l’Etang du Bois…
Tout à côté de l’habitation, venait la salle des meules. Le bief, parallèle à la rivière, ressemblait à un canal avec des murets sur chaque berge et une vanne.”
L’article dit aussi qu’en 1858 le moulin chôma pour cause de sécheresse.
Communes entourant Champlemy
St-Malo en Donzyois
En 1548 est cité un moulin Carré à St-Malo. Sans doute à l’actuel hameau des Carrés, mû par le Pèlerin, affluent de la Nièvre de Bourras.
La carte Cassini dressée vers 1754 n’indique aucun moulin dans l’espace de St-Malo.
Lorsque j’avais travaillé sur les moulins du canton de La Charité sur Loire, en 1998, j’étais tombé sur la mention d’un moulin de St-Malo rapportant à l’abbaye un fermage de 420 livres par an. Je n’ai pas retrouvé cette mention.
Le 11 mars 1878, Le Journal de la Nièvre raconte un accident survenu à un « domestique » de M. Blond, « meunier à St-Malo » : ayant chargé des sacs de blé sur un chariot, un jeune homme monte à côté du conducteur, mais il en tombe et se tue.
Il y a eu un moulin à vent à St-Malo, sur une colline à l’ouest de la Nièvre. Appartenant à Félix Germain en 1852, il passe ensuite à Etienne Perrin, qui, malgré un revenu fiscal net intéressant, de 76,73 F en 1852, le démolit en 1862 (AD matrices cadastrales, 3p/252/2).
St-Bonnot
Au village de St-Bonnot, le ruisseau dit de St-Bonnot coule plein nord pour aller rejoindre la Nièvre de Champlemy vers la Ferrauderie. Il a alimenté un moulin, cité dans le livre « Histoire cronologique du prieuré de La Charité sur Loire » : « C’est aussi l’an 1210 que Guillaume, évêque d’Auxerre, déclare que l’étang et moulin de St-Bonet, que le prieur et les religieux avaient donné à Robert de Chasnet pour en jouir pendant sa vie, doit retourner après sa mort aux dits religieux ».
Dans Le Marteau Pilon 2015, notre ami Alain Bouthier raconte la vente du haut fourneau de St-Bonnot en 1605, par François de La Rivière, seigneur de Champlemy, à Pierre Gascoing, un personnage localement important à l’époque, d’un montant de 3 600 livres. Il bénéficie de l’eau d’un étang, plus en amont de celui-ci d’un étang Colas. Ce haut fourneau est assujetti à un cens de 21 livres au profit du prieuré de La Charité sur Loire. La liste des forges de 1809, publiée par Le Marteau Pilon de juillet 1994, indique à St-Bonnot 3 forges totalisant 26 ouvriers.
Dans les matrices cadastrales des années 1840, on ne remarque qu’un bien modeste « bocard », appartenant aux associés Glapin et Brotot. Son revenu fiscal net n’est que de 19 F (AD 3p234/2)
Châteauneuf Val de Bargis
Liste des moulins connus de nous, avec la date la plus ancienne d’existence trouvée : “Le Moulin” 1230 ; moulin du Pont 1255 ; Maison-Basse ou moulin St-Laurent (Bellary) 1258 ; moulin de Poussot, vers la Girardine 1382 ; moulin du Pré Brion, vallée de la Chaume, autrefois à l’abbaye de Bourras 1515 ; Les Chaumes : 1515 ; Forge du Pont 1539 ; les moulins sur Auzon 1679 ; Pernay 1638 ; Crot Raveau sur la carte Cassini vers 1754 ; moulin Bocard avant 1789 ; moulin de Cantenne 1789 ; une huilerie en 1829 à Jarreau puis Gauthier. Huilerie Cendre 1866.
Le site de Chaume fait l’objet d’une vente entre seigneurs en 1515 ; il compte alors un moulin et un bief ; l’acheteur projette d’y construire la forge hydraulique qui va durer 3 siècles. Lors de l’établissement du cadastre en 1829, Châteauneuf ne compte plus qu’un moulin, une forge et une huilerie. En fait les deux premiers sont dans le secteur dit des Chaumes, ils apparaissent bientôt comme possédés par M. Goblet. Le revenu fiscal net et estimé à 250 F pour la forge et 400 le moulin. Mais Goblet vend la forge à M. Maillet, qui la convertit en moulin à blé en 1847. Comme la forge était considérable, notamment avec ses deux roues hydrauliques, c’est probablement ce nouveau moulin qui va survivre plusieurs décennies sous le nom de « Moulin des Chaumes ».
L’autre moulin, l’ancien « moulin » de M. Goblet, appartient ensuite à M. de Rolland, dont on reparlera à propos de Dompierre. Il est dès cette époque surnommé « Le Petit Moulin ». C’est sans doute celui qui appartient à Jean Cendre en 1871, dont le revenu fiscal net n’est plus que de 20 F. Il ne reparaîtra plus dans aucun document de ma connaissance.
En 1841, M. Bellevault a envisagé de construire un moulin à l’emplacement d’un ancien bocard, mais sa mort a mis fin au projet (S4138 des AD).
En 1887, le moulin des Chaumes est tenu par son propriétaire meunier François Paris, qui y demeure (cités dans le dossier 3E64 191 du notaire Boileau, AD).
En 1889 le moulin des Chaumes, disposant de deux paires de meules, appartient à Louis Hisquin. Il est assujetti à une patente de 70,70 F. En 1893, son propriétaire est Joseph Muter, qui certes est assez moderne, puisqu’il paye en 1899 la taxe sur les vélocipèdes, mais pour autant n’équipe pas l’établissement de cylindres (dossier 2P86 des AD). Joseph Muter, qui exploite lui-même le moulin de Chaume en tant que meunier, cherche noise à un voisin qui pompe l’eau de la Nièvre de Bourras, mais 1500 mètres environ en amont du sien, avant même la confluence avec la Nièvre de Champlemy (AD S6025).
Comme Châteauneuf ne compte qu’un moulin en 1891 (contre trois en 1885), je suppose qu’il s’agit de celui des Chaumes : il emploie trois ouvriers payés de 2 à 3 F pour une journée de travail de 14 heures (AD M6358).
1910 : le moulin est au chômage parait-il à cause des inondations, mais je ne l’ai pas trouvé dans les documents fiscaux de 1908, ni ensuite dans plus aucun document.
La commune a disposé de deux huileries : l’une appartenant à Louis Jarreau (probablement celle existant en 1829) puis à Louis Gauthier, mais qui se trouvait à Chamery, loin de la Nièvre, l’autre à Claude Cendre, qui n’a existé que de 1866 à 1869, également assez loin de la Nièvre (numéro de plan 855).
Arbourse
Aucun établissement hydraulique n’est connu de nous : le seul moulin repéré est celui de Charles Jeannet, une huilerie sans doute à manège (meules mues par un animal), existant en 1939.
- Dompierre sur Nièvre
Liste des moulins connus de nous, avec la date la plus ancienne d’existence trouvée : Forges hydrauliques, une au Méez 1300, une à Dompierre 1454 (création) ; moulins de Vilaine 1626 ; moulin de l’étang de Béquois 1652 ; un moulin à grain en 1655 ; forge du château de Dompierre (1754).
Vers l’an 1100, un seigneur local a donné l’église de Dompierre aux religieux du prieuré de La Charité sur Loire, qui « y ont acquis depuis beaucoup de biens, c’est à présent une des principales terres du prieuré où il y a un chasteau assez considérable » écrit un chroniqueur au XIIe siècle dans « Histoire cronologique du prieuré de La Charité » ; on peut penser qu’il y avait là un moulin. Un successeur y écrit ensuite : « L’an 1454, le prieur Chambellan donna à ferme, pour 29 années, à Pierre Rudequelle et Philippe de Milly, les fossés de la pescherie et place forte de Dompierre, avec les biez en dépendant, moyennant 13 livres par an, et à la charge d’y faire une forge qui retourneroit au prieuré au bout de 29 ans ; c’est le commencement de la forge de Dompierre. »
Le dossier 1B46 des Archives Départementales évoque en 1655 un meunier à Dompierre sur Nièvre. En 1697, la « Grosse Forge de Dompierre » a une roue pour manœuvrer le martinet, et plusieurs dans un atelier d’affinerie (inventaire publié par Le Marteau Pilon 1992).
Le B 503 indique qu’un procès a été engagé, contre Louis de Roland, seigneur de Tansène et de Rebourse, pour avoir fait construire un moulin à blé sous l’étang de Béquois, à Dompierre sur Nièvre, sans autorisation du seigneur local, mais il gagne en appel devant le présidial de St-Pierre le Moûtier, sur le fondement que l’endroit est un territoire de « franc-alleu »..
Vers 1700, Robert Convert, meunier en la paroisse de Dompierre, porte plainte contre le curé pour injures. Il a dû exister à Dompierre un battoir à écorce puisque la parcelle n°590 s’appelle « pré du Battoir ».
Saisie à la Révolution de 1789, équipée d’au moins deux roues, la « forge de Dompierre » fut estimée lors de sa mise en vente rien moins que 80 000 F. Elle fut achetée par les frères François et Noël Martin, mais en 1813 il apparut qu’ils n’avaient pas fini de la payer, alors qu’elle appartenait désormais à un sieur Lhuissier. C’est donc à ce dernier que l’administration réclama le reliquat, soit 1489 F (AD, 1Q842 à 844).
Au XIXe siècle, 4 établissements se succèdent le long de la Nièvre , dont la valeur locative en 1813 est la suivante : Forge de Metz 800 F, moulin de Vilaine 700 (tous deux à M. d’Arbourse), moulin de Dompierre à M. Wagnien 600, moulin du Château (qui vient de remplacer l’ancienne forge) 800. (AD 2F1).
Tous quatre subsistent en 1840, dont les trois moulins à grain (Vilaine, Dompierre et le « moulin du Château »). Dans les années 1850 la vive concurrence suscite de fortes inimitiés entre leurs propriétaires, mais cela entraîne l’administration à dresser leurs règlements d’eau, comme le montrent les dossiers S2291, 4142 et 6364 des Archives Départementales :
– La forge de Metz, à M. Paul de Rolland en 1843 lorsqu’elle reçoit son règlement d’eau, chôme à partir de 1847. Classée comme assujettie à un revenu fiscal net de 200 F seulement, augmenté des 26 F du bocard, elle va être abandonnée. Bien que possédant deux roues, elle ne sera jamais convertie en moulin : l’essentiel de la superficie occupée retournera à l’état de nature.
– Le moulin de Vilaine, au même Paul de Rolland, reçoit son règlement d’eau par arrêté préfectoral du 23 mai 1856. Il dispose de deux roues. Revenu fiscal net 280 F dans les années 1850 (AD, 3p101/2)
– Le moulin de Dompierre : appartient à M. Blond lorsqu’en 1853 il fait l’objet de l’arrêté préfectoral portant règlement d’eau. En 1856, son revenu fiscal net est de 350 F, ce qui indique le meilleur établissement de Dompierre. Blond opère une importante modernisation dans ces années-là, tout en n’utilisant qu’une roue (il installe les meilleures nouveautés technologiques, dont « le montage demi-à l’anglaise », implicitement avec des élévateurs). Il utilise un barrage plus élevé, suite à quoi des voisins se plaignent qu’il risque d’inonder leurs prés, d’où le règlement d’eau.
– La “grosse forge du château de Dompierre”, qui est convertie en moulin à grain entre 1813 et 1840. En 1856 est notifié l’arrêté préfectoral portant son règlement d’eau. Le moulin dispose cette année-là de deux roues, comme le montre le plan du dossier S2291. Elle appartient alors à M. Lhuissier, qui se trouve être le maire du village. Le moulin est au bout d’un bief très long puisque son premier déchargeoir est à 1841 mètres en amont. La forge, dont le revenu fiscal net est de 280 F, dispose d’un bocard dont il n’est que de 26 F. (Plan AD série S).
Des articles et annonces dans le Journal de la Nièvre indiquent ceci :
– 1861 et 1865 : à vendre moulin dit du Château, 2 roues, 2 paires de meules, terres. Appartient à Louis puis à Jean Lhuissier qui l’afferme 1500 F par an.
– 1892 : à affermer moulin de Dompierre 3 paires de meules (à vendre en 1909).
Aux Archives Départementales, des dossiers indiquent en 1870 les moulins de Dompierre, de Vilaine et du Château (S10150), puis vers 1890 trois moulins à grain en activité, occupant 7 ouvriers dont les salaires s’échelonnent de 2 à 3 F par journée de 12 heures (AD M 6316). Ce nombre d’ouvriers passe à 10 en 1890 ( AD M 6352).
Les Blond accroissent leur capital meunier en mettant la main sur le moulin du Château (et le château lui-même aussi). Le moulin du Château est en 1890 à Pierre Blond, qui dispose de 2 paires de meules et perçoit le revenu fiscal net de 330 F, tandis qu’à celui dit de Dompierre Jean Blond, ne perçoit que 298,40. Tous deux se définissent comme meuniers. Dans la même période, le moulin de Vilaine, toujours aux De Rolland, se maintient à un bon niveau avec un revenu fiscal net de 428 f puis 477. Son meunier est Pierre Hisquin en 1890 (les Hisquin sont une dynastie de meuniers qu’on rencontre souvent dans le secteur). Pourtant il semble fermer avant 1900. C’est le moulin du Château qui prospère le mieux, son revenu fiscal net passant à 1330 F en 1908 (sûrement suite à une importante modernisation dont l’acquisition de cylindres), Pierre Blond, son propriétaire, semblant moins l’exploiter directement puisque Jean Arnouard y est meunier. M. Blond-Moreau, propriétaire et meunier au moulin de Dompierre, possède des biens à St-Malo qui l’assujettissent à un impôt de 113,73 F, ce qui est relativement considérable.
Au XXe siècle
Par la suite, ce sont les Trameson qui, propriétaires, s’imposent comme « minotiers », avec Edouard qui perçoit un revenu fiscal net de 1156,50 F en 1917, puis 1825,50 F en 1933. Edouard, encore officiellement meunier en 1934, laisse l’exploitation à ses fils Louis et Paul en 1935. Ils portent le revenu fiscal net à 2875 F en 1938.
Le dossier M5573 des AD comporte une liste de moulins à la capacité de production en 24 heures supérieure à 10 quintaux, tous à cylindres, parmi lesquels on note à Dompierre sur Nièvre un moulin à M. Trameson (30 q).
En 1940, l’administration estime M. Trameson capable de produire 15 000 q de farine par an.
La lettre ci-jointe de 1943 montre que les Trameson se définissent comme « minotiers », qu’ils utilisent et cylindres et meules, mais aussi livrent avec un camion.
Les annuaires du syndicat des meuniers après 1945 indiquent que le « moulin de Dompierre » est tenu par les frères Trameson, avec un contingent de 11 314 q, de 1947 à 1967 (il est classé en catégorie 2).
La lettre ci-jointe de 1943 montre que les Trameson se définissent comme « minotiers », qu’ils utilisent et cylindres et meules, mais aussi livrent avec un camion.
Les annuaires du syndicat des meuniers après 1945 indiquent que le « moulin de Dompierre » est tenu par les frères Trameson, avec un contingent de 11 314 q, de 1947 à 1967 (il est classé en catégorie 2).
Les communes du cantonde La Charité
Pour les communes du canton de La Charité, nous nous référons au livre “Nos moulins au fil de l’eau”, que Les Amis de La Charité ont publié en 1999 ; nous avions participé à la recherche préparatoire et à la rédaction de cet ouvrage. Les communes en question sont Beaumont la Ferrière, La Celle sur Nièvre et St-Aubin les Forges. Cependant nous ajoutons des éléments trouvés depuis.
Beaumont la Ferrière
Curieusement Beaumont commence en amont de La Celle avec le moulin et la forge de Grenant (voir plus loin).
La Celle sur Nièvre
Liste des moulins connus de nous, avec la date la plus ancienne d’existence trouvée : La Celle : 1222 (deux moulins en 1353) ; Mauvrain : 1838 ; une huilerie et un moulin à vent avant 1880.
En 1222, le seigneur donne au prieuré de La Charité une rente sur le moulin de La Celle. En 1353, un des deux moulins de La Celle travaille le fer. Il a pour maître de forges en 1571 Guillaume Léonard (29-F.13 des Ad).
Selon le dossier B114 des AD, en 1721 des meuniers de La Celle, Jacques et Antoine Nolat, sont impliqués dans un meurtre.
Au XIXe siècle
Deux moulins à eau fonctionnent à la Celle sur Nièvre au cours du XIXe siècle : le très ancien dit de La Celle, sur la Nièvre de Champlemy, et celui de Mauvrain mû par le Mauvrain, affluent du Mazou. Le dossier S2296 des Archives Départementales met en valeur que ces moulins font l’objet d’arrêtés préfectoraux portant règlement d’eau : celui de la Celle, le 31 août 1857, le montre appartenant à M. Blond gendre Moreau (donc semble-t-il de la famille des Blond, qu’on a remarqués propriétaires et meuniers à Dompierre). En 1867, le Journal de la Nièvre annonce à vendre le moulin de La Celle, doté de 2 paires de meules, grenier au-dessus, maison d’habitation du meunier attenante, grange, écurie.
Le moulin de La Celle continue une belle carrière. Longtemps son propriétaire et meunier est Claude Bonnet, auquel succèdent sa veuve puis son fils Jean-Baptiste , notamment dans les années1885, 1892, 1908, 1910, 1915, son revenu fiscal net évoluant respectivement ainsi : 207,98 F, puis 122,11 F, puis 625,50 F, puis 778,35 F, puis 206,50 F (matrices cadastrales).
Une carte postale de ce moulin a été publiée avec un poème d’Achille Millien : elle met en valeur la grande roue qui semble recevoir l’eau à hauteur de l’axe. Le poème nous informe cependant d’une rareté de cette roue pour la Nièvre :
« Lente et noire, vire la roue
Elle monte et descend, secoue
L’eau qui tombe en perles changeant
Chaque goutte de la rivière
En bel écu de bon argent
Pour le trésor de la meunière »
Elle est donc dotée de ce mécanisme compliqué qui permet de modifier la hauteur de la roue suivant celle d’arrivée de la rivière. La carte postale sert d’illustration à la couverture du livre de Sylviane Jurquet, « Histoires d’entre Nièvres et forêts », aux éditions de l’Armançon.
Une huilerie et un moulin à vent ont existé à La Celle peu avant 1882, dont j’ai trouvé trace dans les matrices cadastrales, mais je n’en sais rien d’autre.
En 1883 les deux moulins de La Celle occupent 5 ou 6 ouvriers suivant la saison, payés de 3,5 à F par jour (AD M 6316) ; ils en emploient 5 en 1885 rémunérés 2,50 F (M 6328).
XXe siècle
Pendant la guerre de 1914-18, le grand moulin de La Celle est tenu par M. Bonnet : il fait partie des moulins importants dont l’administration contrôle l’approvisionnement et la production ; c’est dans le dossier relatif à ce contrôle, conservé aux Archives Départementales, série M, que nous avons trouvé la lettre dont ci-joint l’en-tête.
Le dossier M5573 des Archives Départementales comporte une liste de moulins des années 1920-30 à la capacité de production en 24 heures supérieure à 10 quintaux, tous à cylindres, parmi lesquels notons le moulin de La Celle sur Nièvre à Emmanuelle Dusaul 40 quintaux. En 1934 son meunier est M. Lazare Guyard.
L’Annuaire de 1937 indique à La Celle sur Nièvre le moulin à électricité Vigoureux, et celui de 1938 un moulin à eau Pierre frères, et un moulin à électricité Vigoureux. En 1940, M. Vigoureux tient le moulin de La Celle avec une capacité de mouture de 40 quintaux en 24 h.
Dans les annuaires de la meunerie après 1945 on remarque la « minoterie de La Celle », tenue en 1947, 1951 et 1953 par M. Pierre Louis, avec un contingent de 6908 quintaux. Par la suite il décline peu à peu pour fermer vers 1957. « Nos moulins au fil de l’eau », l’ouvrage publié par Les Amis de La Charité sur Loire en 1999, contient la grande photo de deux machines à cylindres, prise en 1993.
Beaumont la Ferrière
Liste des moulins connus de nous, avec la date la plus ancienne d’existence trouvée : Bourneul 1395 (Bourgneuf) ; forge de Beaumont 1454 ; Sauvage : moulin 1503 ; La Planche-Baillaut avant 1535 : Choulot avant 1535 ; Beaumont : 1535 ; moulin de Grenant 1451 : forge de Grenant 1538 ; ; Beaumont : Usine des Machines XVIIe ; moulin de l’Etang d’Ensus : 1645 ; La Chape 1649 ; Chézeux 1649 ; La Carrière : forge 1665 Foulon de la Carrière 1732 ; la Fontaine d’Angiro : forge XVIIIe ; Foulon près du moulin de Beaumont : 1732. Dans sa “Monographie de Beaumont la Ferrière”, de 1896, Gaston Gauthier évoque les moulins, les forges et les deux tuileries de Beaumont, plus le moulin de Vingeux à St-Aubin les Forges.
Les moulins de Beaumont avant 1789
Beaumont la Ferrière porte ce nom en 1384, ce qui suggère que le fer y est déjà exploité, sans doute déjà sous forme de forges hydrauliques. Par la suite, plusieurs forges se développent, souvent des moulins à grain leur étant “juxtaposés”, comme l’écrit Gauthier.
La forge de Beaumont semblant datée de 1454, il est probable qu’elle a été accompagnée d’un moulin à grain dès cette époque, pour alimenter le village et les ouvriers de l’établissement. Mais l’étang du « moulin de Beaumont » est créé en 1514. Le plus anciennement connu des moulins à blé de Beaumont est celui de Bourneul en 1395 (aujourd’hui Bourgneuf), qui deviendra un haut-fourneau. D’autres moulins à grain apparaissent en 1535, dans le secteur de Sauvage (La Planche-Baillaut et Sauvaiges).
Les Archives Départementales possèdent un dossier 29F13 relatif au moulin de Grenant de 1451 à 1667, difficile à étudier. En 1553, le moulin à grain de Grenant est proche de la forge. Il est banal : les manants de la seigneurie sont tenus d’y mener moudre leur grain. En 1621 le meunier Nicolas Duglas dispose, près du moulin, d’une « maison » (29F13 des AD). En 1640, le meunier de Grenant, nommé Pierre Larosque, doit chaque année au seigneur et propriétaire 32 boisseaux de froment, 85 boisseaux de farine, des poules, du beurre, des fromages et un gâteau à la fête des rois. Plus tard, son successeur Pierre Claireau doit un fermage annuel de 230 livres pendant 6 ans, plus un porc gras, 6 poules, 6 livres de beurre “et la fleur levez des farines” (Gauthier). Il est acheté en 1655 par un marchand tanneur, sans doute pour recevoir un atelier de battoir à écorce (ou afin d’être converti en moulin à écorce).
Un moulin à grain existe à l’étang d’Ensus en 1645.
En 1649, les meuniers du moulin de Chappe sont Jean et Antoine Serrurier (AD, B 40). Ils engagent un procès contre Barthelemy Morize, meunier au moulin de Chezeux, même paroisse, pour vol de cheval et d’une fournée, et violence. B40.
Le moulin Choulot est forcément ancien, ayant travaillé le grain avant sa conversion en forge en 1663. Le moulin de La Carrière existe déjà au XVIIIe siècle (l‘étang de la Carrière a été créé en 1666).
En 1732 le moulin à blé de Beaumont et la forge de la Carrière disposent l’un et l’autre d’un foulon à drap. Ces foulons devaient être importants et donner des pièces assez fines puisqu’on se donnait la peine de faire venir de la terre à foulon d’Angleterre (Gauthier).
Gauthier livre un tableau montrant qu’en 1791 le hameau de la forge de Bourneuf compte 6 ménages et 31 habitants, celui du moulin de Choulot 3 et 18, celui de la Forge de Beaumont 7 et 27, celui de La Vigne qui comprend le moulin de Sauvage 2 et 14.
A la Révolution de 1789
La plupart des forges sont confisquées par l’État, qui les met en vente. Il en va de même pour le moulin de Choulot, son propriétaire, le fameux Lavenne de Choulot, ayant émigré à l’étranger. J’ai trouvé au sujet de ce moulin deux documents en apparence contradictoires :
– Le 1Q1361 des Archives Départementales indique que le moulin de Choulot consiste en un bâtiment doté d’une roue, mais d’un étang assez important. En 1790 il rapporte 400 livres par an de fermage. Des réparations sont effectuées par un charpentier en 1793 pour un montant de 100 livres. Le moulin est vendu à Noël Martin (sans doute l‘acquéreur d‘un moulin de Dompierre sur Nièvre) l’an suivant, pour à peine 6 516 livres. Lavenne de Choulot percevra sous Charles X une indemnité de 8371,25 F.
– Le 5N1 des Archives Communales (conservées aux Archives Départementales) : un document non daté indique que le propriétaire du moulin de Choulot est un sieur Guiscle. Un expert évalue le revenu du moulin à 186 livres et 5 sols. Le plus intéressant est qu’il évalue le total des biens de Lavenne à 2183 livres ; le moulin comptait donc pour un peu moins de 9% ; Guiscle a acheté une partie dont le revenu est estimé à 571 livres : le moulin lui procure donc près d’un tiers de son revenu sur cette propriété.
Pourquoi deux noms de propriétaire différents ? Le problème vient que des gens ont acheté les biens nationaux par grandes masses, puis aussitôt les ont revendus on dirait aujourd’hui « par appartement », donc en faisant un bénéfice sur chaque élément. On peut penser que Noël Martin aura acheté une grande part des biens de Beaumont (entre autres) et se sera dépêché de les revendre, dont une partie à Giscle. La différence de revenu est plus complexe : elle peut indiquer que Lavenne incluait dans ses contrats de bail un fermage couvrant le moulin et toutes les terres attachées à lui, alors que l’estimation au temps de Giscle ne vise que le moulin lui-même.
La forge de la Carrière devient un moment moulin à blé mais va être rétablie (Marteau-Pilon, juillet 1990).
Une curieuse affaire secoue la contrée en l’an VI de la République. La Nièvre manque d’eau en raison d’une sécheresse persistante. Or « un homme étranger à la commune de Beaumont et se disant chargé des affaires du citoyen Babaud Villemenant propriétaire » (il s’agit de Babaud de la Chaussade) retient les eaux qui alimentent le moulin de Beaumont et la forge de la Carrière, cela d’autant plus illégalement que celle-ci ne fonctionne plus. Il n’hésiterait pas à encombrer les cours d’eau pour ralentir encore le cours de l’eau. La municipalité est invitée par l’administration du district à intervenir pour faire cesser ce trouble (dossier 1L417 des Ad).
Après la Révolution
Le XIXe siècle est dur pour les forges hydrauliques de la Nièvre, qui pour la plupart ferment avant 1852.
En 1826, le moulin de Beaumont se trouve tout de suite en aval du fourneau de Bourgneuf, chacun après son étang. Ils ont le même propriétaire : M. Chaillou, maître de forge. Le moulin est modeste, avec une seule roue.
La forge de Sauvage abrite un moulin à grain en 1827, selon Née de La Rochelle (cité par Les Moulins au fil de l’Eau). La plupart des anciennes forges sont converties en moulins à blé, avec plus ou moins de réussite ; l’établissement de la Carrière devient moulin à grain dès 1825 ; il s’appellera plus tard “le moulin de Beaumont” (Ref : La Nièvre royaume des forges).
En 1850, un gros propriétaire local, un sieur Regnard-Roux, se plaint que ses prés sont inondés à cause des moulins et demande un nouveau règlement d’eau entre autres pour le moulin de la Carrière. Celui-ci est mû par le ruisseau de Batilly. Il appartient à un sieur Dittmer. En 1860, Regnard continue ses plaintes, le moulin étant alors au vicomte d’Anchald (Archives Communales 3 0 7). Le nouveau règlement d’eau préfectoral impose à d’Anchald de reconstruire son déversoir (dossier des AD série S.
Le moulin a grain de Choulot est saisi et fait l’objet d’une vente judiciaire en 1864 (Journal de la Nièvre). Il est fermé en 1868 selon “La Nièvre Royaume des Forges”. Il s’appelle alors Moulin Tricot. Le domaine de Choulot, dont il fait partie, fait l’objet d’une nouvelle vente judiciaire en 1871.
Gauthier écrit que le « moulin de Beaumont » est reconstruit en 1877.
La « Forge de Beaumont » ne contient plus qu’un atelier en 1892 : un moulin à bocard.
Deux anciennes forges demeurent moulins à grain dans les années 1880
– D’une part le moulin dit de Beaumont, plan 234 bis, qui, appartenant à Vincent Bourtoux en 1880 puis en 1897 à Antoine Turquet « marchand de fer », rapporte à ce dernier cette année-là le revenu fiscal net de 775,50 F.
– D’autre part un moulin tenu par son meunier Frédéric Delavault, à deux paires de meules, dont le revenu fiscal net est de 412,50 en 1892. Il s’agit sans doute du moulin de la Carrière, qui a fait l’objet entre temps d’un arrêté préfectoral ordonnant à son propriétaire le vicomte d’Anchald de modifier son vannage en 1880. C’est un moulin imposant avec ses 19 portes et fenêtres et ses deux paires de meules (quoique : pas encore de machine à cylindres).
Le dossier M 6320 des Archives Départementales n’indique qu’un moulin à Beaumont en 1884 ; il emploie un seul ouvrier, rémunéré de 3 à 4 F. par jour
On tend de plus en plus à l’appeler « moulin de Beaumont », comme semble le confirmer l’identité de la victime de l’affaire qui suit. En effet, en 1893 a lieu un horrible accident du travail au « moulin de Beaumont » : le meunier Hippolyte Delaveau, 23 ans, a une jambe saisie par un engrenage ; l’état de sa blessure s’aggrave dans les jours qui suivent et il s’éteint (Journal de la Nièvre, 10 septembre). Mais on peut émettre qu’Hippolyte est lié à Frédéric Delavault (l’orthographe des noms n’est pas un souci premier pour la presse de l’époque), donc travaille à son moulin.
Nouvel accident en 1904 au « moulin de Beaumont » : le meunier M. Bourdier entreprend de faire rouler une meule, avec l’aide de son commis et de sa sœur Léonie Bourdier. Malheureusement la meule leur échappe et tombe sur Léonie : elle a la jambe écrasée et le bassin fracturé. Son agonie dure quelques jours et elle s’éteint. (La Tribune républicaine, 19 novembre)
En 1908 : le propriétaire cherche à affermer le « moulin de Beaumont », lequel est « tout nouvellement monté à cylindres ». C’est à un M. Arnouart qu’il convient de s’adresser, sans doute parent des Arnouard du moulin de Chamilly à St-Aubin les Forges (Journal de la Nièvre, 6 avril).
La carte postale ci-dessous du « moulin de Beaumont », mais ne montrant pas sa roue, porte un joli poème d’Achille Millien, le célèbre écrivain habitant la commune :
« O moulin, petit moulin
Puisses-tu tourner sans fin,
Si, – tant au pauvre qu’au riche, –
A la veuve, à l’orphelin,
Aux errants du grand chemin,
Aux gueux qui cherchent leur pain,
A tous ceux qu’étreint la faim,
Tu dois assurer la miche. »
St Aubin les Forges
Liste des moulins connus de nous, avec la date la plus ancienne d’existence trouvée :
– Forges : Forge d’En Haut ou Chamilly 1355, Forgebas 1486 ; Vingeux 1487, Bouquard 1659 ; et 4 à la Doué dont La Doué 1522 , d’en haut de la Doué 1521, du milieu de la Doué 1759, d’En-bas de la Doué dite Le Château 1812, Forge Basse ou Forge-Neuve de la Doué 1700.
– Moulins à grain : Frasnay les Chanoines : 1487 ; moulins à papier à la Douée avant 1689 ; moulin du Boucard 1803 ; moulin La Roche 1841 ; moulin du Gué de la Chaize 1831. En 1840 : 7 forges et 4 moulins.
Quelques établissements de St-Aubin ont été mus par la Nièvre (Le Gué de la Chaise, Vingeux, le Bocard, Chamilly), mais curieusement c’est son affluent la Douée qui en a connu le plus, si modeste qu’il paraisse aujourd’hui. Les informations relatives aux règlements d’eau sont dans les dossiers S2318 et S4160 des Archives départementales, qui détiennent aussi les matrices cadastrales 2p 539 et 540, 3p 321/2 et suivants)).
Avant 1789
Comme son nom l’indique, St-Aubin fut essentiellement tournée vers le travail du fer. Le moulin de Frasnay, par ailleurs banal, devient une forge en 1487. Il est de nouveau moulin à grain en 1626. En 1706, son meunier s’appelle Marin Protat (dossier B 283 des Archives départementales).
A Vingeux il y a une forge en 1487, mais l’étang existe en 1530, avec moulin, possédé par le seigneur de Beaumont qui en « fait hommage » à son suzerain local Imbert de la Platière, « maréchal de Bourdillon », seigneur de Vingeux (Ref : monographie de Beaumont la Ferrière, par Gauthier).
En 1689, dans le dénombrement du « fief de la Douée », on note une « forge à fer » « au lieu de laquelle étaient autrefois deux papeteries » (Marteau Pilon juillet 2000).
Un curieux dossier au sein du 2q219 des Ad évoque indirectement (à propos d’un chemin) le moulin du « Boucard » de St-Aubin les Forges, en fructidor de l’an 10 (donc 1803) dont le plan montre qu’il est situé entre Vingeux et Chamilly. Un atelier tout simple, avec sa petite roue à l’extérieur.
Au XIXe siècle jusqu’en 1880
Le dossier 3P321/2 des Archives Départementales montre qu’au début de la confection du cadastre dans les années 1836-40 St-Aubin dispose de 7 forges hydrauliques et 4 moulins.
En 1812, M. Mitot possède le « Moulin du Bocard », sur la Nièvre, construit sans autorisation en 1793, « à la place d’une ancienne forge » précisera Namy. Le dossier 2Q219 des AD sus-évoqué contient un document relatif à un champ situé « près du moulin de la Roche » en 1832.
En 1833, plusieurs établissements appartenant aux « Forges de la Chaussade », qui demeurent biens de l’État, sont mis en vente, ce dont on trouve quelques détails dans le dossier 2Q 219 des AD. En particulier sont dispersés (aux enchères) :
– Un « moulin de la Douée », donc un atelier lui-même distinct des «forges de la Douée ». Il se compose d’un bâtiment moulin comprenant une chambre à feu et un four (donc un logement pour le meunier), plus une étable et une écurie, plus un bâtiment « situé près de la maison du garde », consistant en une écurie, une « batte de grange », « un plongeon et une écurie double ». Equipé d’une seule roue et une seule paire de meules, mais avec « deux gros câbles » et tous ses agrès, il est en lui-même estimé d’un revenu de 500 F, mais l’ensemble des champs et prés qui l’entourent et qui sont affermés avec lui portent le revenu annuel à 1041 F. M. Grasset achète l’ensemble pour seulement 3240 F.
– La « petite forge de Chamilly » qui va bientôt devenir moulin à grain. Comprenant plusieurs « tournants et virants », elle procure l’estimable revenu annuel de 1146,72 F. M. Barthelemy Perrot l’achète à peine 3720 F. Décidément, l’État se laisse un tantinet spolier.
En 1836, sur le seul site de la Doué, il y a 4 forges et 2 moulins à blé (Journal de la Nièvre). Au début de la confection du cadastre, on remarque un très gros propriétaire, Etienne Grasset, sans doute lié aux Grasset de Clamecy et Varzy qui se sont souvent illustrés comme propriétaires de moulins (et dans un lointain passé comme meuniers). Il possède :
– Les quatre forges de la Douée, à savoir la Forge de la Douée : numéro de plan 207, la Forge d’En-Haut 208, la Forge du Milieu 217, la Forge Neuve 100.
– Le « moulin de la Douée » plan 190, revenu fiscal net 300. Reconstruit en 1848.
A partir de 1843 le « Moulin et bocard » plan 208, la deuxième des forges de la Douée, devient un « moulin et bocard ». L’établissement a deux roues (alors que les 3 autres forges de la Douée de M. Grasset ont l’une 2 roues et les deux autres 3 roues) ; son revenu fiscal net est seulement de 100 F. Mais ce moulin ne semble pas résister longtemps, puisque en 1855, sous Louis Grasset, le « moulin » apparaît « reconverti en maison », seul subsistant le bocard… converti en moulin à grain (et aussitôt vendu à M. Duverne). Accessoirement, les trois autres forges de la Douée ferment sans doute avant 1850. En 1859, est à vendre la propriété de la Douée, dont un moulin à blé « mû par une fontaine », l’affaire étant traitée par Me Thuret, notaire.
Un moulin à blé apparaît en 1831 mais il existait sans doute bien avant : Le Gué de la Chaise, plan 34, à M. Vinet, revenu fiscal net 230 F. Or un Pierre Vinet, meunier, né en 1817, de St-Aubin les Forges, faisant partie des révoltés contre le coup d’état de 1851, sera pour cela déporté en Algérie : je suppose que c’est son fils. Le Gué de la Chaise, appartenant à M. Forqueray, fait l’objet d’un arrêté préfectoral portant règlement d’eau en février 1840. Il a une seule roue.
Les matrices cadastrales révèlent une autre forge : celle d’Amédée Morin, plan 201, démolie en 1862 sans être reconvertie en moulin.
Les Forges de Guérigny, établissement de l’État, possèdent les Forges de Vingeux plan 812, 1600 F, de Chamilly plan 90 bis et de Forgebas 113bis, plus un « Moulin de la Douée » plan 190 (donc en copropriété avec Grasset), au revenu fiscal net de 300 f. Elles vendent Vingeux et Chamilly dans les années 1840-50 (elles vendront plus tard Forgebas, mais il ne sera jamais converti en moulin).
En 1839 , écrit Berthiau dans Le Marteau Pilon 2017, l’usine à fer de Vingeux compte « un marteau de 522 kg mu par une roue à aubes de 10 à 12 cv » et « une machine soufflante à deux cylindres, à simple effet, ayant pour moteur une roue de la force de 2 chevaux » ; l’inspecteur dépêché pour examiner Vingeux recommande de l’abandonner à plus ou moins bref délai. La vente se fait en 1847 ; l’acquéreur est le vicomte d’Anchald. Il fait une bonne affaire : alors que l’usine est évaluée 28 742,08 F, l’État la lui cède pour seulement 17 800 ; hé bien ça ne convient pas encore assez à Monsieur le Vicomte, puisqu’en 1852, donc 5 ans plus tard, il apparaît qu’il n’a toujours pas payé ; la préfecture lance une procédure de « déchéance de l’adjudicataire » ; du coup il se dépêche de payer. (AD 2q226). En fait il ne va pas rester propriétaire longtemps.
En 1849, le moulin du Bocard, sur la Nièvre, appartient à M. Leyval.
En 1853 Vingeux, reconverti en moulin à grain, appartient à M. Guyoux ; il bénéficie de l’arrêté préfectoral portant règlement d’eau du 15 septembre 1853 ; c’est un moulin à 2 roues. La disposition est assez extraordinaire : la vallée « est barrée par une levée de 6 mètres de hauteur et de 190 m de longueur. La digue est traversée par un aqueduc voûté de 16,30 m de longueur, de 1,76 m de largeur, par lequel passent les eaux alimentaires de l’usine ». Problème : un envasement provoque des inondations chez les voisins. Etienne Salin apparaît comme propriétaire du moulin de Vingeux en 1856 : en fait il le reconstruit et ajoute une paire de meules en 1857. Il dispose de deux roues. Mais il est mis en vente la même année 1857 (annonce dans Journal de la Nièvre). Son revenu fiscal net passe de 300 F en 1856 à 450 F en 1864. En 1860, le moulin de Vingeux appartient à un M. Charpentier (cité incidemment dans le dossier des Archives Communales relatives au moulin de la Carrière à Beaumont). Nouveau propriétaire en 1862 : M. Bassinet vend le moulin de Vingeux à M. Guyoux ; le moulin a deux roues en bois avec montants en fer, des blutoirs et 2 paires de meules ; l’ancien bâtiment de logement du personnel demeure, avec des chambres à feu. Prix : 16 000 F, l’acheteur étant prévenu de servitudes, et faisant son affaire des divers impôts. (Dossier AD notaire Thuret, 3e/63/313)
Travaillant à partir du recensement de 1855, Paulin Fay cite un moulin fonctionnant encore à Choulot (il cite aussi le moulin à blé de Vingeux). Le moulin de Vingeux est cité dans la liste résultant de l’enquête administrative de 1870 (AD S10150).
En 1853 est à vendre la forge de Chamilly, mise à prix 6 000 F au sein d’un lot de 300 000, lui-même au sein d’une immense propriété (Journal de la Nièvre). L’établissement de Chamilly bénéficie, en guise de règlement d’eau, d’une ordonnance du 29 décembre 1845 puis d’un arrêté préfectoral du 28 octobre 1857. Alors apparaît une grande famille de meuniers, les Arnouard. Ils possèdent une grande quantité de parcelles sur la commune de St-Aubin lorsqu’ils acquièrent l’ancienne forge de Chamilly, devenue moulin à grain, construction nouvelle en 1859, dont le revenu fiscal net est de 450 F.
Des annonces dans Le Journal de la Nièvre montrent à vendre :
– En 1859 le grand domaine de la Chaize, qui comprend le moulin de ce nom, notaire Saget.
– En 1872 les hangars de la tuilerie de Cros-Haugras, qui sont dotées d’un « tonneau broyeur ».
D’autres en 1874, 1875 et 1882 indiquent à affermer le moulin de la Doué. A cette dernière date il est à Jean Godot. Il ferme probablement peu après.
Après 1880
Dans sa monographie inédite de 1887, conservée à la Médiathèque municipale de Nevers, l’instituteur Namy écrit : « Les bâtiments des (anciennes) forges sont actuellement occupés par des moulins ; on en compte 6 dans la commune, dont 5 sur la Nièvre et 1 sur le ruisseau de la Douée ». Il évoque, outre le moulin du Bocard, Le Gué de la Chaise, « moulin important récemment reconstruit », « La Roche, ancien moulin situé au confluent de la Nièvre et du ruisseau de Choulot », et Vingeux : « La forge de Vingeux fut convertie en moulins » dont on remarque le pluriel.
Il ne cite pas Forgebas qui ne semble plus marcher et qui, lors de sa vente en 1906, apparaîtra comme un ensemble de logements des ouvriers des forges, avec un canal de fuite nommé « des anciennes roues hydrauliques ».
Les dossiers M 6316, 6320, 6325 et 6358 des Archives Départementales indiquent à St-Aubin, de 1883 à 1891, 6 moulins à farine (seulement 5 en 1884 et 1891) ; le nombre d’ouvriers varie de 10 à 12, leur salaire changeant selon les époques (par exemple 3 à 3,50 F par journée de travail de 12 h en 1885). Notons toutefois une évolution : en 1891, les 5 moulins de St-Aubin emploient 5 contremaîtres payés de 3 à 4 F, et 5 ouvriers payés de 2,50 à 4 F. On peut émettre l’hypothèse que la modernisation des moulins (sans doute l’achat de machines à cylindres) a obligé les exploitants à embaucher des agents plus qualifiés.
Dans les années 1880 et suivantes les matrices cadastrales indiquent les moulins suivants avec chacun son revenu fiscal net :
– Moulin du Bocard : seulement 232 F. Il passe en 1909 à Pierre Nourry, « retraité de la marine ». Mais cet homme n’étant pas jeune, le moulin est en chômage au début de la guerre de 1914-18. Un voisin se plaint : « Le fonctionnement défectueux du moulin du Bocard, situé sur la Nièvre, prive la fausse rivière dont il est riverain, de l’eau nécessaire à l’abreuvage des bestiaux et au lavage du linge ». Pierre décède en 1916, ce qui hâte la fin de l’exploitation véritable, même si le moulin fonctionne encore un peu en 1917 ; son équipement est bientôt démonté.
– Vingeux : 730 F en 1882 à Alexandre puis Etienne Guyoux, ce dernier étant meunier, 162,44 F en 1892 (Guyoux ne doit plus exploiter lui-même, les meuniers étant Pierre Landry et Jean Lebrun). Il est reconstruit en 1902 : il rapporte alors 355 F, puis 445 F en 1911.
– Le Gué de la Chaise : rapporte 294 F à Pierre Bernard. Il est mis à prix 8 000 F lors d’une proposition de vente en 1902. Le Petit Charitois du 9 juin 1900 annonce une « vente sur licitation entre majeurs » du moulin du Gué de la Chaise, mis à prix 8 000 F. Idem en 1902, où désormais la fille de Pierre Bernard, Anne, apparaît comme propriétaire. Ce moulin s’éteint en 1917, et son équipement est démonté, sauf la roue, qui demeure bien protégée dans une sorte de cage.
– Chamilly : Les meuniers Arnouard maintiennent longtemps en activité ce petit moulin, qui leur rapporte en revenu fiscal net 225,75 en 1885, 756 F en 1890, 132 en 1892, 384 en 1912, 444 F en 1926. Les propriétaires successifs sont tous attachés à bien conserver la roue et le joli petit plan d’eau.
Deux des derniers moulins de St-Aubin les Forges sont contraints au chômage lors des grandes inondations de 1910 : ils emploient alors l’un 4 ouvriers et l’autre 6.
En 1914, à Chamilly travaillent deux frères « Arnouat », comme l’indique incidemment un article du Journal de la Nièvre à propos d’un voisin qui vient de se noyer dans le bief et dont ils découvrent le corps (4 février). Le moulin fonctionne encore en 1934, cette année-là mené par Baptiste Arnouard. En 1940, il a une capacité annuelle de 3 000 q, et un contingent de 1588 q. M. Baptiste Arnouard le dirige encore en 1947, mais le meunier de 1953 est M. Ducaffy (le moulin est alors classé en catégorie 1, la plus modeste des cinq définies à l’époque. Le moulin n’est plus cité par l’annuaire des meuniers en 1956.
On peut encore admirer au moulin de Chamilly une très belle roue reconstruite il y a une trentaine d’années.
Parigny les Vaux
Liste des moulins connus de nous, avec la date la plus ancienne d’existence trouvée : Les Planches 1409. Bizy : 1483. Pont de Sarre ou Ste Seigne 1544. Moulin Neuf de Parigny 1515. Une huilerie vers Satinges 1691. La Rioterie (carte Cassini 1754). Palissonnet, Les Dinons : forges XVe siècle, 4 moulins vallée des Dinons sur la carte Cassini vers 1760. Baverolles : forge 1789. Un moulin à blé à Mussy en 1825, trois en 1840.
Sur la commune de Parigny les Vaux deux ruisseaux rejoignent la Nièvre avant Bizy :
. Le Palissonnet, qui a alimenté un établissement de ce nom, la forge de la Rioterie, et celle de Baverolle.
. Le ruisseau de la Vallée, qui a alimenté les forges des Dinans et de Bizy.
Le ruisseau de Mussy a alimenté les moulins de ce nom, mais il ne rejoint la Nièvre qu’à Urzy (il est cependant plus pratique que je les évoque ici).
Le dossier 268B des Archives départementales indique incidemment un « chemin de l’Huilerie » qui semble se diriger depuis Satinges vers Bizy (1691).
En 1809, Parigny les Vaux dispose de deux moulins à blé, à roue perpendiculaire, travaillant « à la grosse » (farine peu raffinée), avec des meules de La Fermeté : d’abord le moulin des Planches, capable de produire 500 kg de farine en 24 heures, et ensuite celui des Dinons, 450 kg (AD, s4173).
En 1818, Berthier de Bizy possède les forges de Dinans, de Baverolles et de Bizy, cette dernière comprenant un bocard à laitier pour fabriquer le sable (il se trouve sous la digue du « petit étang de Bizy »).
En 1825 Gondier de Cray demande l’autorisation de rétablir un moulin à blé dans son grand domaine de Mussy.
En 1840, Parigny dispose de 5 moulins à blé, ceux des Planches et de Dinons, comme en 1809, appartenant à Berthier de Bizy, auxquels s’ajoutent trois moulins sur le site de Mussy, qui sont à Antoine Charles Gondier (AD, S1474).
Ricroch écrit dans Le Marteau Pilon 2008 qu’en 1843 la forge de Bizy a deux roues hydrauliques à augets, tandis que le site de Dinans comprend d’une part la forge sous un étang dont la digue mesure 100 mètres, puis en aval un moulin à blé dont la digue semble à peine plus courte ; chacune de ces deux « usines » a une roue, celle de la forge étant à augets. Ricroch propose un plan du cite des Dinans très clair.
Peu après ferment les forges de Dinans, Baverolles et Bizy, seul demeurant le bocard de Bizy.
Le Journal de la Nièvre annonce en 1865 à affermer la propriété de Mussy, dont un moulin “à une seule meule”, propriétaire Gondier de Craye. En 1891, son descendant du même nom demande l’autorisation de rétablir à Mussy le « moulin qui y existait autrefois ».
Les dossiers 2p 497 et 498 des Archives départementales n’indiquent pas de moulin à partir de 1881 (mais les propriétés Berthier de Bizy et de Cray ne sont pas détaillées). En 1881 subsiste peut-être un atelier hydraulique à l’ancienne forge de Baverolle, tenu par par M. Ravoir « usinier à Baverolles ». Pierre Morin et Guillaume Picard sont meuniers respectivement à Maupertuis et à Champvoux ; or Parigny compte bien un lieu-dit Maupertuis ; mais à cet endroit la carte n’indique aucun ruisseau. Il ne s’agit peut-être que du domicile de Pierre Morin.
Louis Bertrand est « usinier » à « Fontaine Boutot » (impôt : 45 F en 1922, 82,5 F en 1925, 92,50 F en 1926).
Guérigny
Liste des moulins connus de moi, avec la date la plus ancienne d’existence trouvée : moulin de Guérigny 1638, Les Forges création 1638 ; Forge de Villemenant fin XVe ; Forge de la Poëlonnerie XVe siècle. Moulin à seble 1839. Moulin à vent 1858. Huilerie Ponge 1875. Huilerie Benoît 1882. Usine à ciment 1941.
Pour cette étude, je préfère situer Guérigny au bout de la Nièvre de Champlemy parce que c’est là qu’on peut encore observer une belle roue hydraulique et le dessus de deux anciennes turbines (site historique au joli plan d’eau et dont le musée est ouvert à la visite l’été).
Selon «La Nièvre royaume des forges», citant de Soultrait, l’établissement métallurgique de la Poëlonnerie «semble avoir été créé en 1659» mais une autre source m’indiquait 1640. Je ne me rappelle pas où je l’ai trouvée existant au XVe siècle.
Dans Le Marteau Pilon de juillet 2012, Francine Gribet écrit que le site de Villemenant dispose d’une forge hydraulique depuis au moins la fin du XVe siècle.
En 1638, le sire de Villemenant a entrepris d’exploiter ce formidable site hydraulique où se rejoignent les deux Nièvres, de Champlemy et d’Arzambouy, et où existait vraisemblablement un moulin à grain ; il en a fait un haut lieu du travail du fer. Par la suite le site a occupé des centaines d’ouvriers et utilisé toutes sortes de machines, dont des roues à aubes et des turbines, aussi bien sur la Nièvre d’Arzembouy (usines de la Poelonnerie et de Villemenant) que celle de Champlemy (vers le plan d’eau actuel).
Le dossier B86 des Archives départementales cite incidemment un meunier à Guérigny en 1695.
En 1722, lorsque M. Masson, le beau-père de Babaud, achète le site de Guérigny (dont La Poëlonnerie), il y trouve à côté des ateliers métallurgiques un moulin à blé (Actes du colloque La Chaussade, 1992, Amis du Vieux Guérigny). Par la suite des roues sont conservées ou implantées dans plusieurs endroits de Guérigny, sur la Nièvre de Champlemy de préférence, mais sans doute aussi sur celle d’Arzembouy (il me paraît évident qu’il y en a eu non loin du château de Villemenant). Puis Babaud de la Chaussade provoque un développement formidable du site, avant d’en vendre l’essentiel au roi en 1781, dont les diverses forges «de Guérigny» proprement dit, ainsi que celles de Villemenant et de La Poelonnerie. En 1793, La Poelonnerie a une seule roue, mais elle fait marcher un marteau, un martinet et deux soufflets de forge (Marteau Pilon 1994).
En 1809 La Poëlonnerie est encore une « grosse forge » (dixit «La Nièvre royaume…), mais en 1811 elle est réduite à « un seul bâtiment de 18 mètres sur 10».
Souvent, les forges avaient un petit moulin qui pulvérisait le « laitier » (résidu noir brillant restant après la fabrication de la fonte ou du fer). Proche de cela, le site de Guérigny a contenu un “moulin à sable”, noté dans un inventaire en 1839. En 1855, « un vieux moulin à triturer le sable est mû par une roue en bois de 3 chevaux. Le sable servant au moule des canons doit être pulvérisé par un petit moulin … Le sable idéal ne doit pas fondre à la grande chaleur, ne doit pas être pur pour avoir du liant, mais il ne contient pas de terre. Il doit être rude et anguleux » (actes du colloque Fonderie et Marine, Amis du Vieux Guérigny, 1992). Dans Le Marteau-Pilon de Juillet 2017, Jean-André Berthiau détaille les roues dont disposent les différents ateliers métallurgiques en 1839.
La Poelonnerie ferme en 1847, le bâtiment étant détruit. Il semble qu’elle n’ait jamais été convertie en moulin (le dossier 2q225 des AD contient son plan en 1892).
Les matrices cadastrales indiquent (3 P 132/2 des Archives Départementales) :
- un moulin à vent plan 495 à M. Geoffroy Pierre en 1858, qu’il transforme cette année-là en écurie.
- une huilerie plan 433 à M. Ponge Pierre en 1875, qu’il vient de créer, mais dont je ne trouve plus trace ensuite
- et une huilerie plan 1006 à Claude Benoît en 1882, revenu fiscal net 345,89 F (plutôt remarquable).
- En 1888 existe à Guérigny une importante cimenterie qui sans doute utilise des meules : elle emploie 6 ouvriers payés de 2,50 à 3 F par jour pour 10 heures de travail (M6343 des AD)
- En 1900 le moulin à sable fonctionne encore, avec une roue hydraulique, selon Le Marteau Pilon n° XII de juillet 2000. Cette année-là, le site actuellement dit «des forges royales», le plus proche du château de la Chaussade, reçoit les deux turbines dont on peut observer le dessus, tout en conservant au moins une roue. Celle-ci demeure, fort bien entretenue par les Amis du Vieux Guérigny.
Ce même tome raconte comment en 1941, pour faire face à la pénurie, les habitants de Guérigny retamisaient la seule farine qu’ils pouvaient se procurer, trop chargée de son, mais cela à l’aide de leurs moulins à café. Parmi les Actes du colloque de 1992, on note un exposé sur une usine de Guérigny contemporaine fabriquant du ciment à l’aide entre autres de «broyeurs» qui donnent une «farine». Un livre ayant été publié sur les forges de Guérigny par les Amis du Vieux Guérigny, nous ne pouvons que conseiller au lecteur de s’y reporter.
Actuellement, la mairie de Guérigny voudrait bien remettre en marche des turbines sur le site dit «des forges royales» où demeurent celles posées en 1900, pour produire de l’électricité, mais dans son hypocrisie souveraine, tout en se déclarant favorable au développement des énergies renouvelables, l’État met toutes les embûches possibles, entre autres par l’intermédiaire de son bras armé, le SIEEN (syndicat chargé de l’électrification dans le département de la Nièvre).